La Chrysalide ou l’étape de la lente reconstruction

C’est en échangeant avec un groupe que j’accompagne dans le cadre d’un parcours de six mois pour des personnes en épuisement professionnel sévère avec la CPAM et la CARSAT que j’ai développé cette symbolique que je vous partage ici et qui parlera à toute personne en situation de réel épuisement professionnel.

Quand le mental est rattrapé par le corps, que le corps dit STOP !!

Qu’il vous retient au lit, incapable de vous lever ; qu’il fait que c’est le vide devant votre écran d’ordinateur ; que vos nerfs lâchent ; qu’une crise d’angoisse, de tétanie vous terrasse en plein travail ; que vous n’y arrivez plus ; que votre travail a perdu son sens ; que la fatigue a pris toute la place et que vous tombez, …

Vous êtes extirpé alors du monde accéléré et effréné du travail !! Vous ne vous reconnaissez plus, vous qui ne vous êtes jamais arrêté, vous véritable bête de travail, perfectionniste, soutenant inlassablement vos collaborateurs et l’entreprise à laquelle vous avez tout donné !!

Maintenant, vous n’avez même plus la force de faire une tâche simple sans ressentir une fatigue immense !! Vous êtes une autre personne. Sans savoir si vous allez pouvoir retrouver la personne que vous étiez.

Vous vivez l’étape de la chrysalide, celle qui fait le trait d‘union entre l’état de chenille et celui de papillon.

Quand la chenille se retrouve dans la chrysalide, le temps semble s’arrêter de l’extérieur : on ne voit rien se passer !!

Et pourtant, c’est une véritable mutation, transmutation même qui s’opère de l’intérieur et qui nécessite ce temps long mystérieux et essentiel pour que surgisse un autre, le papillon.

Le saviez-vous : la chenille dans la chrysalide se décompose complètement, elle mute en une « pâte » qui va ensuite se recomposer totalement. Ce ne sont pas seulement des ailes qui vont pousser, le corps tout entier est « reconstruit », remodelé.

C’est exactement la même chose qui advient pour la personne en épuisement professionnel. Comme la chenille, peut-être, elle ignore tout de son devenir. La chenille s’imagine-t-elle devenir un être volant ?  Elle qui a rampé sur le sol, le long des branches sur un support terrien. Elle ignore tout de sa future vie. Que va-t-il rester de la chenille après sa transmutation ? Se pose-t-elle des questions ? Nous l’ignorons.

En tout cas, nous humains, nous nous en posons pleins des questions et en particulier quand l’avenir est incertain, inconnu : Serais-je capable de reprendre mon ancienne vie professionnelle ? Tout semble me dire le contraire. Serais-je même capable de revenir dans le monde du travail ? Je n’ai plus d’énergie, comment en trouverais-je encore ? Le temps passe et je vais devoir y retourner mais est-ce possible ? Vais-je tenir ? Mon corps le peut-il encore ? …

Vous êtes en arrêt avec la nécessité de prendre soin de vous, mais vous n’arrivez pas à vous centrer sur le seul besoin de prendre soin de vous maintenant. Vous êtes happé par l’à venir !! Cela vous « pompe » littéralement de l’énergie que vous n’avez déjà plus.

Il est nécessaire de laisser le processus suivre son cours. La chenille ne peut pas devenir papillon du jour au lendemain. Elle ne peut pas faire l’économie de ce long passage dans la chrysalide.

C’est la même obligation qui vous est imposée, nécessaire et vitale. Durant le temps de la chrysalide, la chenille, qui n’est plus vraiment chenille et pas encore papillon, ne peut se projeter dans l’apprentissage des airs.

La chrysalide doit se consacrer à sa lente transmutation, laisser le temps faire son œuvre pour que le futur papillon se constitue dans le respect des lois internes de la transmutation biologique.

Vous aussi, il vous faut lâcher votre projection dans un futur qui demeure inconnu pour l’instant. Qu’allez-vous devenir ? Nul ne le sait encore. Allez-vous changer de métier ? Faire un bilan de compétences ? Faire une formation pour exercer un nouveau métier ? Vous reconvertir ? Cela crée beaucoup d’inquiétudes, d’angoisses qui sont énergivores et puisent dans le peu d’énergie qui vous restent.

Or, cette énergie vous en avez besoin pour vous reconstruire, pour prendre soin de vous, comme la chrysalide a besoin de toute la patience et de l’énergie centrées sur la « construction » de ce nouvel être en devenir !!

Cette transmutation de la chrysalide est mystérieuse, elle se passe à l’intérieur du cocon, à l’abri des regards ; tout comme votre transmutation qui demande de saisir ce qui s’est passé dans le travail, ce qui dans le système travail vous a abîmé, en quoi vous n’avez pas su dire stop, poser des limites, sortir de vos croyances que vous alliez faire plus que ce qu’un humain peut faire, sortir de loyautés toxiques qui vous ont enchaîné au travail et éloigné de ce qui est vital et essentiel pour vous.

Il faut laisser le temps au temps : le temps à votre chrysalide de vous coconner pour recharger vos batteries, pour retrouver une vision renouvelée de ce qui fait sens pour vous dans le travail et dans votre vie personnelle tout autant.

Comme la chenille qui ignore qu’elle va changer d’univers en passant de l’univers terrestre à celui céleste des airs, vous ignorez où vous allez vous épanouir, autrement, dans le monde du travail, après vous être reconstruit(e). 

Vous êtes dans la chrysalide et il vous est impossible, impensable de vous imaginer où sera votre à venir. La chenille ne peut pas croire qu’elle va changer radicalement d’univers. Vous non plus !!

Acceptez de prendre le temps de vous reconstruire. Ne vous battez pas contre le temps. Car « le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui » comme le dit Paul Morand déjà en 1941 dans l’homme pressé.

Acceptez cette chrysalide, ce cocon bienveillant qui vous protège pour vous aider à vous reconstruire. Les psychiatres, psychologues et médecins qui accompagnent savent au combien le corps a besoin de se reconstruire à son rythme.

Vivez la nécessaire chrysalide. Vous faites parti de celles et ceux qui ne se sont jamais arrêté, qui ont foncé sans compter pendant des années, en cumulant plus que votre poste, en tenant pour vos équipes. Vous qui vivez un réel épuisement professionnel, vous n’avez rien à prouver aux autres. Vous n’êtes pas de celles et ceux qui en font le minimum et qui ne risquent en rien d’être épuisé par le travail.

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