Quand je me suis retrouvé face au défi de proposer ma meilleure astuce pour appliquer mes bonnes résolutions, je me suis dit que ce n’était pas pour moi, qu’une astuce ne pouvait pas, à elle seule, venir à bout du long travail à opérer sur soi pour réussir à appliquer des résolutions aussi bonnes soient-elles.
Mais, j’ai trouvé que le défi valait le coup d’être relevé car la demande d’astuce reste néanmoins légitime.
Je vais commencer par exposer les difficultés que je repère dans le fait de proposer une astuce qui serait la meilleure pour appliquer nos bonnes résolutions. Cela permettra de clarifier mon positionnement et de définir ce que je vais proposer comme astuce spécifique.
La notion de temps
La première difficulté est celle du temps. Nous sommes dans un monde où tout va de plus en plus vite et où nous cherchons les solutions les plus efficaces et les plus rapides pour être au top, pour toujours faire plus, pour correspondre à ce que l’extérieur attend de nous… mais comme le disait si bien l’écrivain Paul Morand (1888-1976), « le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui » ou comme le dit cette image, « ce n’est pas en tirant sur une plante qu’elle poussera plus vite ». La quête de la meilleure astuce cache souvent le désir idéal d’avoir un outil rapide et efficace. L’humain, comme les plantes, poussent à leur rythme, ce qui est loin d’être celui du rythme rapide que nous souhaiterions parfois.
Notre vision du monde et nos freins
La deuxième difficulté est centrale, elle est liée à nos freins personnels. Nous nous sommes construits à partir des expériences vécues dans notre petite enfance auxquelles nous avons dû faire face sans tout l’attirail conceptuel et langagier qui se développeront plus tard. Le petit enfant qui est dépendant de son entourage va devoir trouver des réponses à toutes les expériences et les événements qu’il rencontre pour survivre et bâtir sa personnalité faite de croyances, de valeurs et de comportements. Tout ce processus – je ne rentre pas dans tous les détails ici – va créer une vision du monde à partir de ces filtres et de comment il a ressenti ce qu’il a vécu. Cette vision va se cristalliser et se fixer de façon définitive. Même s’il est possible de transformer cette vision du monde et d’apprendre à faire avec par un travail profond de connaissance de soi et de transformation, toute notre vie, nous aurons à gérer cette vision du monde initiale qui restera à jamais présente et active. Beaucoup d’approches mettent des pansements sur les blessures sans la soigner. Un léger mieux se fait sentir un certain temps mais la plaie n’est pas soignée et la douleur va refaire surface. Ceci signifie qu’il est essentiel d’apprendre à se connaître pour décrypter les freins issus de notre vision spécifique du monde. Nous pourrons vouloir mettre en œuvre toutes les bonnes résolutions du monde, elles ne tiendront pas dans le temps si, premièrement, nous n’avons pas dépisté les freins essentiels qui nous constituent ; si deuxièmement, nous n’avons pas appris à faire avec ; et si troisièmement nous ne savons pas comment les transformer en ressources.
Pour illustrer cela, voici des histoires qui permettent de mesurer comment l’implication d’événements passés structure la vision du monde et continue d’impacter la vie une fois adulte :
– C’est l’histoire vraie d’un petit garçon qui est sur la plage avec sa sœur et son père. Le père ne s’intéresse qu’à la fille. Le garçon décide d’être le meilleur pour attirer l’attention. Adulte, il ne comprend pas qu’il réussisse tout ce qu’il entreprend.
– Jean a été séparé de sa mère à la naissance, séparation due à une dépression de sa mère. Il a vécu un manque affectif. Adulte, il passe son temps à combler le manque en ayant une intense activité intellectuelle et par des occupations incessantes.
– Jacqueline a un frère moins brillant qu’elle. Elle réussit à tous les examens et a une intelligence très vive. Elle en est culpabilisée, d’autant que la famille lui reproche tacitement d’écraser son frère par sa réussite. A 40 ans, elle a d’importantes responsabilités professionnelles, qu’elle remplit avec une grande efficacité, mais dans la confusion intérieure, dans le tourment permanent d’écraser les autres, d’usurper une place qui n’est pas la sienne. Elle a pris sur elle la destinée de son frère !
A partir de leur blessure respective, de ce qu’on leur a fait, chacune de ces personnes a décidé quelque chose qui était nécessaire sur le moment pour ne pas être détruite mais qui est devenu un schéma complexe. Et maintenant, tout ce que ces personnes vivent est passé au crible de leur vision du monde. Cela est ancré très profondément dans leur mémoire cellulaire et leur corps s’en souvient. Je renvoie aux études d’Arthur Janov et à son livre le cri primal.
Changer fait envie et peur à la fois
A cette difficulté est liée la question du changement. Changer vraiment nous attire. Nous voudrions changer nos vieilles habitudes, c’est le moteur qui nous incite à prendre de bonnes résolutions. Mais pourquoi ne tiennent-elles pas le plus souvent ?
Changer nous fait tout autant peur que cela nous fait envie. Pourquoi ? Tout simplement parce que notre inconscient veut nous protéger et nous éviter de revivre tout ce qui a constitué des expériences désagréables ou perturbantes. Une de ces premières expériences est notre naissance qui nous a fait passer d’un cocon, où tout nous était fourni en continu de façon automatique (nourriture, chaleur, confort, etc.), à un monde où nous sentons que tout change (température, présence et absence de nourriture, luminosité ou le noir, etc.). L’inconscient gardant la mémoire du vécu n’apprécie donc pas la nouveauté, le changement et souhaite faire perdurer le connu, même si le prix à payer à rester identique est lourd. Ainsi, changer n’est pas si simple. Il serait nécessaire de déployer beaucoup plus toutes ces notions mais ce n’est pas le but ici.
Nous sommes tous différents
Enfin, je relève un dernier point qui concerne le fait que nous sommes tous différents. Nous pouvons nous poser la question suivante : est-ce qu’une astuce peut fonctionner pour tout le monde ? A priori, non. Pour la simple raison que chaque astuce fait généralement appel à un certain type de fonctionnement : la logique, l’imaginaire, l’intuitif, le visuel, l’auditif, le kinesthésique… Chaque astuce sera donc plus adaptée aux personnes réceptives au type de fonctionnement utilisé par celle-ci. Par conséquent, certaines astuces marcheront mieux avec certaines personnes et pas avec d’autres.
Malgré ces difficultés, je vais vous proposer une piste qui va s’adresser à tous. Si j’affirme qu’elle s’adresse à tous c’est parce qu’au fond il ne s’agit pas d’une astuce, d’un truc au sens strict qui serait adapté à certaines personnes et pas à d’autres. Je me situe là au niveau des principes qui sont applicables à tous. C’est plus une attitude, un positionnement à adopter en amont des astuces ou outils que vous pourrez tester ensuite. Un autre argument est le fait que l’observation de soi ne s’appuie pas sur un type de fonctionnement particulier. Bien au contraire, il vise à les transcender tous. Notre façon particulière de voir le monde par le biais de nos types de fonctionnement privilégiés réduit et restreint notre appréhension de celui-ci.
L’observation de soi
Vous avez pu saisir, grâce à ce qui précède, la vision qui sous-tend ma façon d’accompagner les individus et les collectifs. Au fondement, à la base de cette vision se situe une attitude nécessaire et utile pour progresser dans sa vie, apprendre à se connaître et se réaliser au mieux : c’est l’observation de soi.
C’est ce qui nous permet de nous révéler à nous-mêmes et nous aide à nous réajuster constamment au jour le jour. Car comme une plante pousse, se transforme, nous évoluons, nous devons faire face à de nouveaux défis, nous avons sans cesse à nous adapter. L’observation de soi nous permet de nous réajuster perpétuellement. Cette attitude nous aide à appliquer n’importe quelle astuce que vous pourrez trouver par ailleurs. Elle nous permet de prendre du recul tout en restant complètement connecté à ce que nous ressentons sur le moment. Elle fait tenir ensemble deux postures : celle d’être comme une caméra extérieure à nous-mêmes qui nous observe et celle qui reste en contact avec notre vécu et ressenti. C’est cette prise de recul tout en restant au contact réel de ce que nous vivons, ressentons, qui nous permet de nous désolidariser d’aspects qui nous perturbent et évite d’être comme happé par cet élément perturbateur. Ce recul nous rend capable d’analyser relativement sereinement la situation. Il nous redonne la capacité de pouvoir décider sans être complètement englué dans la situation difficile. En théorie, cela peut sembler simple. Mais en pratique, cela demande du temps, de l’entraînement. Comme pour toute chose, nous ne devenons pas experts en une seule fois. C’est la répétition et la persévérance qui vont ancrer de nouvelles habitudes, de nouvelles attitudes face à ce qui nous arrive. En acquérant cette habitude, vous vous équipez d’un outil universel qui sera un soutien pour pouvoir mettre en application toutes les autres astuces que vous pourrez trouver pour appliquer vos bonnes résolutions. Quand viendra une difficulté pour persévérer dans l’usage de l’astuce pour appliquer vos bonnes résolutions, vous pourrez faire appel à l’observation de soi pour mesurer, saisir, appréhender ce qui est en jeu, ce qui se passe en vous, ce qui vient résister en vous. Le recul offre l’observation de soi vous permettra de poser une juste distance vis-à-vis de la difficulté et vous aidera à prendre la décision la plus à même à renforcer votre persévérance, à réajuster votre engagement à appliquer vos bonnes résolutions. Cela peut aussi vous amener à comprendre que la résolution choisie n’était peut-être pas la bonne ou pas adaptée à ce moment précis de votre vie. Sans jeter le bébé avec l’eau du bain, vous pourrez modifier ce qui est nécessaire pour réorienter votre résolution enrichie par cet éclairage de l’observation de soi. De plus, ce travail d’observation donnera à cette réorientation non pas le visage de l’échec de votre résolution mais le visage d’une connaissance nouvelle sur vous-mêmes.
Comment s’observer ?
Pour être dans une observation juste de soi-même, il est nécessaire à la fois de rester connecté à soi-même, pour ressentir ce qui se passe en soi comme les sensations, douleurs, ressentis, émotions ; et à la fois mettre une partie de soi à distance qui va observer et se désolidariser du vécu pour pouvoir le regarder de façon neutre, c’est-à-dire sans porter de jugements sur les aspects que nous ressentons cités ci-dessus. Cette partie qui se met en observation n’est pas en soi le mental, puisque celui-ci a pour rôle de juger les situations. Cela ne signifie pas qu’il en soit absent. Il est même nécessaire. Mais il n’est pas tout seul. Nous avons perdu l’habitude de mettre en œuvre cette composante spécifique de l’observateur. Pour la retrouver et qu’elle soit efficiente, nous avons besoin d’entraîner notre esprit à redécouvrir cette posture particulière d’observateur neutre, qui observe tout ce qui se passe sans poser ni des jugements, ni des conseils, ni de laisser nos réflexes habituels prendre le relai. C’est une position difficile d’autant qu’il s’agit de rester en contact avec le vécu intérieur qui entraîne de fait, naturellement, des réflexes de défense ou d’attaque ou de repli. Ces trois réflexes puissants orchestrés par notre cerveau reptilien. Donc, c’est en pratiquant régulièrement que nous acquérons la véritable posture de l’observateur en passant par des phases où le naturel reprend le dessus, puis nous en prenons conscience et nous reprenons notre poste d’observation, jusqu’à la prochaine chute et ainsi de suite.
Donc oui, il est simple de s’observer car nous n’avons besoin d’aucun outil extérieur mais c’est compliqué à mettre en œuvre, car nos habitudes sont bien ancrées. Pour faciliter ce travail, vous pouvez observer votre respiration sans la transformer. C’est une porte d’entrée royale pour apprendre à observer et qui nous est constamment accessible sans le besoin d’outils et de conditions particulières, puisque nous ne pouvons pas vivre sans respirer.
Concrètement, voici quelques consignes pour vous aider à observer votre respiration :
– Fermez les yeux, cela facilite la focalisation sur votre objet d’observation en vous coupant de tout ce qui est extérieur et peut vous perturber visuellement.
– Soyez à l’écoute de votre ressenti intérieur. Vous allez être attentif ou attentive à tout ce que la respiration entraîne comme mouvement à l’intérieur de vous que ce soit l’inspiration et l’expiration, mais aussi les sensations de l’air qui entre et sort du corps, les mouvements musculaires liés au corps qui s’expanse à l’inspiration et se rétracte à l’expiration.
– Le tout sans modifier sa respiration ce qui n’est pas si simple car nous avons le réflexe quand nous observons notre respiration de la canaliser en lui donnant un rythme régulier.
– Observez en laissant la respiration avoir son rythme naturel qui va peut-être vous gêner car vous la trouverez peut-être trop saccadée, trop rapide, trop lente ou bien encore trop irrégulière. Vous entrez alors dans cette double posture d’observation neutre et d’accueil du ressenti procuré par la respiration qu’il soit agréable ou non.
En vous focalisant ainsi sur la respiration, vous devenez observateur ou observatrice. Une fois bien acquis, vous pouvez commencer à observer d’autres choses comme l’observation d’une douleur, d’une émotion, d’une situation ou d’un vécu.
Testez, continuez au-delà des chutes. Comme pour apprendre à marcher, vous êtes tombés souvent avant de trouver un équilibre stable et durable.
Cet article participe à l’événement « Votre meilleure astuce pour appliquer vos bonnes résolutions » du blog Devenez meilleur. J’apprécie l’approche d’Olivier Roland et mon article préféré de ce blog est celui-ci. Cliquez ici pour voter pour mon article si vous l’aimez !