Nous avons pu saisir dans les autres articles la place centrale que doit occuper la qualité de vie au travail. Si l’entreprise met en périphérie la QVCT, elle peut être sûre d’aller au devant de difficultés récurrentes et pérennes.
Il est donc vital que la QVCT agisse dans le maillage organisationnel. L’organisation reflète la réalité et la vitalité de l’entreprise. Le mode d’organisation permet de vérifier si l’entreprise est en phase avec ses valeurs, sa finalité. L’organisation est aussi le vecteur de la manière de communiquer et d’être en relation et c’est aussi celle qui permet de rendre possible les moyens à mettre en œuvre pour une vie saine de l’entreprise. Nous verrons ces deux points dans deux autres articles.
Parler de maillage pour l’organisation vise à appuyer le fait que tout est imbriqué, lié et que chaque élément a son importance et se doit d’être pris en compte. En effet, tout élément qui dysfonctionne dans un système entraîne des répercussions sur l’ensemble du système.
1. Parler d’organisation, c’est parler de structure, de hiérarchie :
J’ai déjà un peu évoqué ce point dans l’article « la QVCT s’enracine sur les valeurs de l’entreprise ». La plupart de nos entreprises sont encore dépendantes et accrochées à une structure hiérarchique pyramidale qui déresponsabilise, démotive et ralentit la croissance même de l’entreprise. Certes, il n’est pas aisé de changer de modèle et tous les acteurs concernés freinent ce changement, y compris celles et ceux qui en subissent le plus les conséquences. La force des habitudes fait que nous préférons garder un système que nous savons usés mais que nous connaissons, c’est rassurant à court terme mais cela impose l’immobilisme à long terme !!
Il est essentiel de réduire le nombre de niveaux hiérarchiques d’une part pour faciliter les échanges de données et solutions, pour rendre plus autonome chaque poste de travail, garant d’une meilleure souplesse et résolution des problèmes. D’autre part, diminuer le nombre de niveaux hiérarchiques rend plus responsable tout un chacun et augmente la motivation intrinsèque et la collaboration par son travail à la réussite de l’entreprise à laquelle on appartient. C’est intégrer la confiance couplée à la responsabilisation.
2. Parler d’organisation, c’est parler de management, de responsabilité :
Le premier point entraîne de facto un changement de management à visée plus collaborative, plus bienveillante. C’est entrer de plein pied dans du gagnant-gagnant. Evidemment, ce changement ne se décrète pas, il doit être préparé, accompagné à tous les niveaux de la structure. Sortir de rapports de hiérarchie et donc de pouvoirs demande à établir une confiance renouvelée, bâtie sur la compréhension que chacune et chacun a sa place, ses compétences à partager. Il s’agit de sortir de la concurrence et de la jalousie pour entrer dans la collaboration, la coopération et l’entraide. C’est saisir qu’on est ensemble dans le même bateau et qu’un mousse est tout autant utile que le capitaine. Sans mousse, les ordres du capitaine seraient vains. De même, si le capitaine ne sait pas écouter les messages des mousses qui sont là où le capitaine n’est pas, le bateau peut courir de graves dangers. Même si la comparaison vaut ce qu’elle vaut, elle vise à ramener du bon sens dans la gouvernance du bateau entreprise. La confiance mutuelle est gage de qualité et un atout de solidité de l’entreprise. Pour ne citer qu’un simple exemple, dans une usine qui fabrique du matériel de bricolage, le vol de matériel a considérablement diminué quand celle-ci est passé du contrôle des employés à la permission donné aux employés de prendre ce qu’ils avaient besoin pour eux personnellement. Des employés écoutés, motivés, participants à la collaboration et au bon fonctionnement de l’entreprise font de cette dernière une entreprise saine avec une bonne qualité de vie au travail.
3. Parler d’organisation, c’est parler de conditions de travail :
Les deux points précédents vont passer de la théorie à la pratique en se concrétisant dans le large champ des conditions de travail. Cela rejoint la question des moyens que l’entreprise met en oeuvre pour une meilleure qualité de vie au travail. Nous le développerons plus largement dans un autre article.
Les conditions matérielles de travail reflètent la façon dont le dirigeant considère ses employés. D’ailleurs, le C a été rajouté à ce qui se nommait avant QVT. Cela montre l’importance des conditions de travail. Cela va de la question de l’ergonomie, de l’adaptation des postes de travail à la fois pour faciliter et rendre efficace le travail mais aussi l’adaptation à la personne spécifique qui peut avoir des besoins particuliers pour être dans de bonnes conditions physiques et psychiques de travail. L’environnement de travail est plus important que nous l’estimons. Et c’est en concertation avec les usagers que les meilleures solutions peuvent être trouvées et souvent sans forcément grand frais. Le gain est bien au-delà des coûts d’aménagement. Mais comme toujours, les mentalités poussent à penser que c’est secondaire et n’a pas de rapport avec les objectifs de rentabilité. Ce qui est une grossière erreur. Tout ce qui participe de près ou de loin à la démotivation, au désengagement des salariés ralentit la croissance de l’entreprise, joue sur l’absentéisme…
La gestion du temps est un sujet central. Nous avons perdu pour la plupart le bon sens de remettre au lendemain ce qui ne peut être fait le jour même, la surcharge de travail crée du stress qui engendre moins d’efficacité, moins de performance et plus de temps pour faire encore plus… Cercle vicieux du hamster dans sa roue, qui plus il court, plus la roue tourne vite jusqu’à atteindre le burnout !! La juste mesure est à retrouver, nous ne sommes pas des ordinateurs, même si eux aussi finissent par chauffer et fatiguer d’une certaine façon ! Nous ne sommes pas des machines et notre corps, ainsi que notre psychisme ont besoin de repos pour se reconstituer. L’équilibre entre le temps de travail et de repos a disjoncté !! La période de confinement et celle du déconfinement n’a pas fait que mettre un peu plus en exergue le problème de sommeil. Le sommeil est une phase essentielle pour se reconstituer et manquer de sommeil, c’est courir tout droit vers un épuisement professionnel.
Attention, chacun n’a pas les mêmes besoins. Il nous faut sortir de l’idée qu’une nuit de sommeil parfaite correspond à 8 heures de sommeil consécutifs. Le fait de se réveiller est bien plus fréquent qu’on ne le dit et la quantité de sommeil ne doit pas non plus se condenser uniquement la nuit. Des phases de repos en journée sont essentielles. Nous savons grâce aux neurosciences que nous ne pouvons pas demeurer concentré plus de vingt minutes environ. La méthode pomodoro visant à se concentrer sur un sujet pendant vingt minutes suivi de cinq minutes de pause est un bon exemple d’une autre façon de faire. La sieste, si mal vu, est un bon moyen de se régénérer en journée pour une meilleure efficacité qu’un long temps de latence après le repas durant la phase de digestion !
Être rentable, efficace ne signifie pas, travailler sans pause, avec des horaires extensibles à souhait. Les jeunes générations ont d’ailleurs le désir de sortir des horaires classiques de bureau pour appréhender des horaires plus décalées et plus souples. Le télétravail peut être un avantage dans ce domaine. Mais il a aussi son revers de médaille avec l’impression de devoir être disponible à tout moment. Cela implique aussi la difficulté de gérer en télétravail les deux sphères sur le même lieu et temps. cela es d’autant plus vrai pour les femmes qui ont fait le plus de frais de surcharge durant la période récente de confinement.
Tout cela montre la nécessité de cadrer le temps de travail, de gérer ensemble de nouvelles façons de travailler tout à la fois pour être efficace et bien dans son corps et dans sa tête.
Ce n’est pas sur le coin d’une table entre deux portes que peuvent se décider tous ces changements. La prise en compte de la qualité de Vie au travail demande un investissement réel et une prise à bras le corps des enjeux d’une entreprise saine et vivable.
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